19 novembre 2020

Publication au JO des ordonnances adaptant les règles applicables devant les juridictions pendant la crise sanitaire

Institution

Trois ordonnances adaptant les règles applicables devant les juridictions judiciaires et administratives pendant la crise sanitaire ont été publiées au Journal officiel, jeudi 19 novembre.

Ces ordonnances adaptent les règles applicables devant les juridictions pour permettre le maintien de leur activité tout en s’adaptant aux contraintes sanitaires et en évitant autant que possible les contacts physiques. Elles reprennent souvent et, parfois, adaptent au présent contexte sanitaire, certaines dispositions déjà adoptées pendant le premier état d’urgence sanitaire au printemps dernier.

1/ Les juridictions statuant en matière pénale

> Ordonnance n° 2020-1401 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière pénale.

  • Article 2 : mesures relatives à l'extension du recours à la visio-conférence.
  • Articles 3 sur la compétence des juridictions : possibilité, pour une juridiction du premier degré, de transférer tout ou partie de son activité à une autre dans le ressort de la même cour.
  • Article 4 sur la publicité des audiences : possibilité pour toutes les juridictions, de tenir des audiences ou de rendre des décisions, lorsqu'elles sont normalement publiques, en publicité restreinte ou en chambre du conseil, la possibilité d'ordonner un huis clos n'ayant cependant pas été reprise.
  • Article 5 à 8 sur les audiences à juge unique (mécanisme identique à celui qui était prévu par l'ordonnance n° 2020-303). Pourront se tenir à juge unique toutes les audiences de la chambre de l'instruction, du tribunal correctionnel, de la chambre des appels correctionnels et de la chambre spéciale des mineurs, du tribunal de l'application des peines, de la chambre de l'application des peines et du tribunal pour enfants (sans les assesseurs non professionnels). Dans toutes ces hypothèses, le président de la juridiction pourra renvoyer l'affaire à une formation collégiale si ce renvoi lui paraît justifié en raison de la complexité ou de la gravité des faits.
  • Article 9 sur la carence du juge d’instruction : le président du tribunal judiciaire pourra désigner l'un des magistrats du siège pour exercer les fonctions de juge d'instruction s'il est absent, malade ou autrement empêché.
  • Article 10 sur la cour d’assises : il prolonge jusqu'au 31 décembre 2021 les mesures d'adaptation prévues par la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 jusqu'au 31 décembre 2020, qui assouplissent le calendrier et la publicité des opérations de tirage au sort des jurés, autorisent la constitution de listes de jurés plus longue, et permettent de répartir la charge des dossiers d'appel entre différentes cours d'assises du ressort.
Durée d’application : Ces dispositions s’appliquent jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois après la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par le décret du 14 octobre 2020, donc à ce jour, jusqu’au 16 mars 2021.

2/ Les juridictions statuant en matière non pénale

> Ordonnance n° 2020-1400 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux copropriétés.

A l’instar de l’ordonnance du printemps, cette ordonnance allège le fonctionnement des juridictions lorsqu’elles statuent en matière civile, sociale ou commerciale :

  • Article 2 sur le transfert de compétence territoriale entre juridictions (en cas de cluster) : reprise de l’article 3 de l’ordonnance n°2020-304 : le premier président de la cour d'appel pourra désigner, par ordonnance, une juridiction du ressort de la cour, pour connaître tout ou partie de l'activité relevant de la compétence d'une autre juridiction du ressort qui serait dans l'incapacité de fonctionner.
  • Article 3 sur l’accès aux juridictions : il habilite les chefs de juridictions à réglementer l'accès aux juridictions et aux salles d'audience, en particulier en fonction de leur capacité à recevoir du public dans le respect des gestes barrières. Il permet aussi au juge de décider que les débats se déroulent en publicité restreinte ou en chambre du conseil. Les journalistes pourront assister à l'audience selon les modalités déterminées par le juge ou le président de la formation de jugement pour permettre le respect des règles sanitaires en vigueur.
  • Article 4 sur le juge unique (avec des dispositions spécifiques au Conseil des prud’hommes)
  • Article 5 sur la visio audience : le juge, par une décision insusceptible de recours, peut décider que l'audience ou l'audition se tiendra en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle permettant de s'assurer de l'identité des personnes y participant et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges.
    En cas d'impossibilité technique ou matérielle de recourir à un moyen de télécommunication audiovisuelle décider d'entendre les parties et leurs avocats par tout moyen de communication électronique, y compris téléphonique.
    Il est précisé que le moyen utilisé doit permettre de s'assurer de l'identité des parties et de garantir la qualité et la confidentialité des échanges, que le juge s'assure du respect des droits de la défense et du principe du contradictoire et que si les membres de la formation de jugement décident de délibérer de l'affaire à distance, le moyen de communication qu'ils emploient doit aussi garantir le secret du délibéré.
  • Article 6 sur la procédure sans audience : la juridiction peut décider d'examiner une affaire selon la procédure sans audience lorsque la représentation par avocat est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat. Les parties, qui en sont informées par tout moyen, disposent alors d'un délai de quinze jours pour s'y opposer, délai qui peut être réduit par le juge en cas d'urgence. A défaut d'opposition des parties, la procédure est alors exclusivement écrite. Le juge ou le président de la formation de jugement pourra toujours décider de l'organisation d'une audience s'il l'estime nécessaire, soit d'office soit à la demande des parties.
    En matière de soins psychiatriques sans consentement, la personne hospitalisée peut à tout moment demander à être entendue par le juge des libertés et de la détention. L'audition est alors réalisée par tout moyen qui permet de s'assurer de son identité, de la qualité de la transmission et de la confidentialité des échanges.
  • Article 7 sur la prestation de serment : la prestation de serment présentée par écrit est réintroduite.

Les autres dispositions concernent le fonctionnement des copropriétés : possibilité de convertir les assemblées générales qui n’ont pu se tenir en raison du confinement en un vote par correspondance et de renouveler automatiquement les contrats de syndic et les mandats de conseillers syndicaux.

A noter également : la publication du décret n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale :

  • Ce décret reprend les dispositions de nature réglementaire de l’ordonnance du printemps :
    • possibilité d'informer les parties par tous moyens de la suppression d'une audience ou d'une audition, notamment par voie électronique lorsque les parties sont assistées ou représentées d'un avocat ou qu'elles ont consenti à la réception des actes sous cette forme sur le « Portail du justiciable ».
    • possibilité pour le magistrat chargé du rapport de tenir l'audience seul et d'en informer les parties par tous moyens dans la procédure écrite ordinaire devant le tribunal judiciaire et dans la procédure avec représentation obligatoire devant la cour d'appel.
    • possibilité pour les parties d'échanger leurs écritures et leurs pièces par tous moyens, sous réserve du respect du contradictoire.
    • possibilité pour le SAUJ de recevoir et de transmettre par voie électronique l'ensemble des actes en matière civile lorsque la représentation n'est pas obligatoire, ainsi que certains actes relevant de la procédure prud'homale et les demandes d'aide juridictionnelle.
Entrée en vigueur et durée d’application : Les dispositions de l’ordonnance relatives au fonctionnement des juridictions et les dispositions du décret sont d'application immédiate aux instances en cours le lendemain du jour de la publication de l'ordonnance, soit le 20 novembre 2020. Elles s’appliquent aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois après la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par le décret du 14 octobre 2020, donc à ce jour jusqu’au 16 mars 2021.

3/ La matière administrative

> Ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre administratif.

  • Article 2 sur la communication audiovisuelle : réintroduit la possibilité de tenir des audiences en usant de moyen de communication audiovisuelle ou, en cas d'impossibilité et lorsque les parties le demandent, par tout moyen de communication électronique. Il rétablit également la possibilité, pour les magistrats, de siéger sans être physiquement présents dans la salle d'audience, sous certaines conditions. D'une part, le président de la formation de jugement, présent dans la salle d'audience, peut autoriser les autres membres de cette formation, c'est-à-dire les assesseurs et le rapporteur public, à participer à l'audience, depuis un autre lieu que la salle d'audience, grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle. D'autre part, le président de la juridiction peut tenir lui-même ou autoriser les magistrats statuant seul à tenir leurs audiences à distance selon ces modalités.
  • Article 3 sur la procédure sans audience : possibilité de statuer sans audience, par ordonnance motivée, sur les requêtes présentées en référé.
  • Article 4 sur le contentieux DALO injonction : dans l’hypothèse où il est prévu de faire droit aux demandes du requérant en l'absence de toute difficulté sérieuse, le juge peut statuer au terme d'une procédure écrite, sans audience.

Cette ordonnance s’applique jusqu’au 16 février 2021.

A noter également la publication d’un décret qui aménage les règles de la procédure administrative contentieuse pendant l'état d'urgence sanitaire : Décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

  • possibilité, devant toutes les juridictions administratives, de communiquer par tout moyen avec les parties ;
  • élargissement aux conseillers de tribunal administratif et de cour administrative d'appel d'au moins deux ans d'ancienneté de prendre des ordonnances « de tri » ;
  • possibilité de statuer sur les demandes de sursis à exécution en appel sans audience ;
  • possibilité pour le président de la formation de jugement de signer seul la minute ;
  • notification à l'avocat valant notification à la partie qu'il représente ;
  • dispense de lecture sur le siège des décisions rendues en urgence dans le contentieux de l'éloignement des étrangers.
Durée d’application : Ce décret s’applique jusqu’au 16 février 2021.
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