10 janvier 2017

Une mission d’assistance et de conseil pour la passation de marchés publics d’assurances peut être exercée par un avocat

Exercice du droit

Le Conseil national des barreaux est intervenu avec succès à l’appui du recours formé par un avocat contre un marché public passé entre un établissement hospitalier et un cabinet de conseil ayant pour objet une mission d’assistance et de conseil à la passation de marchés d’assurances.

Le requérant soutenait que la société cabinet C. n’avait pas qualité au regard des articles 54 et suivants de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 pour se voir confier un tel marché qui impliquait une mission de consultation juridique en particulier pour la rédaction du règlement de consultation ou l’annonce publiée au bulletin officiel des annonces de marchés publics ou encore l’analyse des offres. Fondé sur une cause illicite, le contrat devait donc être annulé.

Le tribunal administratif d’Orléans, dans son jugement du 17 octobre 2013, avait rejeté ces prétentions et considéré que le marché litigieux avait pour objet une mission d’intermédiation en assurance au sens de la directive n°2002/92/CE du 9 décembre 2002 relative à l’intermédiation d’assurance et des dispositions du Code des assurances, ladite mission ne pouvant être exercée que par un intermédiaire en assurance (art. L. 511-1 et s. C. Assu). En l’état de la règlementation applicable, cette activité est incompatible avec la profession d’avocat.

Pour le tribunal, le marché pouvait être attribué à la société Cabinet C. qui justifiait une inscription régulièrement enregistrée par l’Organisme pour le Registre des Intermédiaires en assurances (ORIAS). A ce titre, elle pouvait aussi revendiquer le bénéfice de l’article 59 de la loi du 31 décembre 1971 autorisant sous certaines conditions les professionnels réglementés non juridiques à donner des consultations juridiques relevant de leur activité principale et à rédiger des actes sous seing privé constituant l’accessoire direct de la prestation d’intermédiation en assurances fournie.

Les premiers juges avaient également refusé d’admettre l’intervention volontaire du Conseil national des barreaux.

La Cour administrative d’appel de Nantes réforme ce jugement par un arrêt du 1er décembre 2015

Dans le prolongement de la solution adoptée par le Conseil d’Etat dans son arrêt du 10 février 2014, la Cour administrative d’appel considère que la mission consistant à assister et conseiller une personne publique afin de lui permettre de passer des marchés publics d’assurances et notamment de sélectionner les candidats dans le respect des dispositions du Code des marchés publics n’a pas objet de présenter, de proposer ou d’aider à conclure un contrat d’assurance ou de réaliser d’autres travaux préparatoires à sa conclusion au sens de l’article L. 511-1 du Code des assurances relatif à l’activité d’intermédiation en assurance.

La Cour refuse ainsi de transmettre à la CJUE la question préjudicielle du Syndicat des Auditeurs et Consultation en Risques et Assurances (SACRA), intervenant volontaire à l’instance au soutien de la société Cabinet C. qui soutenait que l’audit et le conseil en assurance dans le cadre d’un marché d’assurances entre dans le champ d’application de la directive 2002/92/CE.

Dès lors, la société Cabinet C., qui avait signé le marché en qualité d’auditeur et de consultant en assurance, et non d’intermédiaire en assurance, devait pour exercer une activité de conseil juridique pour la procédure de passation des marchés, être autorisé à donner des consultations juridiques dans le cadre des articles 54 et 60 de la loi du 31 décembre 1971.

En l’espèce, le dirigeant de la société Cabinet C. ne démontre pas qu’il remplissait les conditions fixées par l’arrêté du Garde des Sceaux du 6 février 2001 (mod. arr. 1er déc. 2003) conférant l’agrément de l’article 54-1 pour la pratique du droit à titre accessoire aux auditeurs et consultants en assurances.

Le marché litigieux est donc annulé comme étant contraire à la loi du 31 décembre 1971, sans qu’y fasse obstacle la circonstance qu’il ait été entièrement exécuté.

Le Conseil national des barreaux justifie bien d’un intérêt suffisant à l’annulation dudit contrat litigieux eu égard à la nature, à l’objet du litige et compte tenu de la mission confiée par l’article 21-1 de la loi du 31 décembre 1971 et des questions générales soulevées par le litige.

Le Conseil d’Etat, par deux arrêts en date du 4 décembre 2016, a refusé d’admettre les deux pourvois en cassation formés par le cabinet C. et le Syndicat des Auditeurs et Consultation en Risques et Assurances (SACRA)

L’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 1er décembre 2015 est donc définitif.
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