06 février 2023

La vidéosurveillance automatisée aux JO et Jeux Paralympiques de 2024 inquiète la profession

Libertés et droits de l'homme

L’assemblée générale du Conseil national des barreaux s’oppose à l’introduction de la vidéosurveillance automatisée que permettrait le projet de loi relatif à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2023.

Alors que la France s’apprête à accueillir les Jeux Olympique 2024, le Gouvernement a déposé un projet de loi devant le Sénat relatif à leur organisation et comprenant des dispositions visant à en assurer leur sécurité. Laurence Roques, Présidente de la commission Libertés et Droits de l’Homme, et Boris Kessel, Vice-président de la commission, ont présenté un rapport et une résolution d’opposition aux dispositions sécuritaires de ce projet de loi adopté par l’assemblée générale du 3 février 2023.

Par cette résolution, le CNB dénonce et s’inquiète des dispositions sécuritaires qui, comme l’a rappelé Boris Kessel vise non à « garantir la sécurité » mais à « restreindre les libertés ».

L’article 7 du projet de loi inquiète particulièrement le CNB en ce qu’il prévoit l’utilisation de traitements algorithmique sur les images de vidéosurveillance afin de détecter des événements prédéterminés susceptibles de présenter un danger pour les personnes. Plus précisément, le texte prévoit qu’ « à titre expérimental et jusqu’au 30 juin 2025, à la seule fin d’assurer la sécurité de manifestations sportives, récréatives ou culturelles qui, par leur ampleur ou leurs circonstances, sont particulièrement exposées à des risques d’actes de terrorisme ou d’atteintes graves à la sécurité des personnes, les images collectées au moyen de systèmes de vidéoprotection (…) de caméras installées sur des aéronefs (…) dans les lieux accueillant ces manifestations et à leurs abords, ainsi que dans les véhicules et emprises de transport public et sur les voies les desservant, peuvent faire l’objet de traitements algorithmiques ayant pour unique objet de détecter, en temps réel, des événements prédéterminés susceptibles de présenter ou de révéler ces risques et de les signaler en vue de la mise en œuvre des mesures nécessaires. » Lecture faite devant l’assemblée générale du CNB, Boris Kessel insiste sur la largesse du dispositif ainsi prévu.

Il alerte également sur le fait que très peu d’informations sur la définition exactes des « événements prédéterminés » qui sera laissée à la discrétion du Gouvernement. Autrement dit, « c’est un texte qui demande au législateur de valider le principe de l’intelligence artificielle mais pour le détail, c’est renvoyé au décret d’application. Ce décret ne sera donc pas validé par les parlementaires. » Boris Kessel rappelle que ce décret pourra être attaqué devant le juge administratif et que le CNB restera vigilant sur son contenu.

Le rapporteur et la rapporteuse ont également dénoncé la place laissée aux entreprises privées dans la création du traitement algorithmique. En effet, il est prévu que l’Etat puisse assurer le développement de ce traitement mais qu’il puisse aussi demander à un tiers privé d’assurer le développement de ce traitement. Pour qu’un algorithmique puisse s’entraîner, ce dernier doit absorber un certain nombre d’image : aucune précision sur les images qui seront choisies par l’entreprise n’est prévue par le texte.

Le traitement algorithmique devra faire l’objet d’un certificat par une autorité administrative dont, rappellent les rapporteurs, on ne sait encore rien si ce n’est qu’il ne s’agira pas de la CNIL. Enfin, il est prévu que ce traitement soit autorisé par les préfets pour un mois mais renouvelable indéfiniment.

S’agissant de l’utilité d’une telle mesure, aucune étude n’en démontre l’utilité. Ainsi, si certaines communes ont eu recours à de la vidéosurveillance automatisée – en dehors de tout cadre légal – , il n’a pas été possible de tirer de ces expériences une quelconque utilité en terme de sécurité.

Au regard des dangers que représente la vidéosurveillance, les rapporteurs proposent à l’assemblée générale d’adopter une résolution d’opposition à l’article 7 du projet de loi. Ils mettent également en garde contre l’extension de la procédure de criblage, enquête administrative préalable à l’égard des participants aux grands événements tels les JO. La résolution mise au vote dénonce enfin la création de nouvelles infractions d’affichage et d’une peine complémentaire automatique, en dépit du principe d’individualisation des peines.

La résolution d’opposition a été adoptée par l’assemblée générale.

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