25 juillet 2018

Déplacement à Luxembourg les 11 et 12 juillet 2018 : retour sur 2 journées tournées vers l’Europe

Affaires européennes et internationales

Les 11 et 12 juillet 2018, une délégation du Conseil national des barreaux s’est rendue à Luxembourg. Au programme : une visite à l’ambassade de France et des rencontres au sein des institutions européennes, à la Cour de justice de l’Union européenne et au Tribunal de l’Union européenne.

Emmenée par Christiane Féral-Schuhl, la délégation du Conseil national des barreaux s’est rendue à Luxembourg les 11 et 12 juillet 2018 à la rencontre de hautes personnalités telles que Koen Lenaerts, le président de la Cour de Justice de l’Union européenne, Marc Jaeger, le président du Tribunal de l’Union européenne, ou encore l’ambassadeur de France au Luxembourg, Bruno Perdu.

Ils ont ainsi pu s’entretenir avec chacune de ces personnalités et faire un constat général : la formation des avocats français en droit de l’Union européenne doit être renforcée. Par ailleurs, cette visite a également été l’occasion pour la présidente du CNB de rappeler l’importance de l’utilisation de la langue française comme véhicule et donc outil de promotion du droit continental.

L’avenir des avocats français se joue dans les institutions européennes, il est par conséquent essentiel d’être mobilisé et présent. Plusieurs points clés pour la profession sont en jeux : la défense de l’usage du français devant les juridictions européennes, la présence et représentation des avocats français, ou encore le projet de Convention européenne des avocats. Autant de projets qui ont pu être abordés durant ce déplacement.

Entretien avec l’ambassadeur de France au Luxembourg, Bruno Perdu

Une délégation menée par Christiane Féral-Schuhl, s’est rendue à l’ambassade de France au Luxembourg afin de s’entretenir avec l’ambassadeur, Bruno Perdu.

De gauche à droite : Jean-Jacques Forrer, président de la DBF, Louis-Bernard Buchman, président de la commission des Affaires internationales et européennes du CNB, Emilie Vasseur, membre de la délégation française auprès du CCBE, Christophe Thevenet, membre du bureau du CNB, Elodie Mulon, secrétaire du bureau du CNB, Christiane Féral-Schuhl, présidente du CNB, Bruno Perdu, ambassadeur de France, Marie-Aimée Peyron, bâtonnière du barreau de Paris

Très mobilisé pour la défense de la langue française auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), vecteur de diffusion du droit continental, l’ambassadeur de France représente la deuxième communauté d’étrangers installés au Luxembourg.

La présidente a présenté le projet d’avocats dans les écoles à l’international, à l’occasion du 20 mars, journée internationale de la francophonie. L’objectif de ce projet est de mobiliser des avocats français installés dans un pays étranger de se rendre dans les établissements scolaires français et francophones afin de présenter au jeune public le rôle de la profession d’avocat et l’importance de la justice dans nos sociétés.

Les échanges ont également porté sur l’innovation et le numérique et les conséquences sur la concurrence de la profession d’avocat.

La délégation a reçu le soutien de l’ambassade de France dans la conduite de ce projet et dans l’objectif de renforcement de la présence française devant les juridictions européennes.

Rencontre avec les avocats français installés au Luxembourg

Ce déplacement à Luxembourg a également été l’occasion d’aller à la rencontre des avocats français exerçant au Luxembourg.

Le bâtonnier du Luxembourg devant les avocats français

Ils étaient nombreux à avoir répondu à l’invitation, majoritairement de jeunes avocats, montrant ainsi l’intérêt qu’ils portent pour l’institution représentative.

La présidente et la bâtonnière de Paris ont ainsi pu réaffirmer l’importance et le rôle des avocats français installés à l’étranger en ce qu’ils sont des ambassadeurs de la profession.

Un échange avec avocats présents a permis de répondre à leurs questions pratiques (assurance, cotisation, formation continue).

Ces rencontres permettent de rappeler aux avocats que le CNB se tient à leurs côtés, à leur disposition pour les accompagner dans l’exercice de la profession. Il s’agit également de leur présenter les évolutions et les réflexions en cours afin de préparer l’avenir de la profession.

Le bâtonnier du Luxembourg, François Prum, a également pu remercier la présence du CNB et s’est réjoui du grand nombre d’avocats français exerçant au Luxembourg.

Dîner en présence du président du Tribunal de l’Union européenne, Marc Jaeger

Un dîner en présence des membres de la délégation française s’est ensuite tenu autour de plusieurs personnalités : Marc Jager, président du Tribunal de l’Union européenne, Michal Bobek, avocat général tchèque, Emmanuel Coulon, greffier au Tribunal, Jean-Marie Gardette, chef d’unité traduction française à la CJUE, Valérie Bauer, référendaire et ancienne secrétaire générale du CCBE, François Prum, bâtonnier du Luxembourg et Bruno Perdu, ambassadeur de France au Luxembourg.

Après un mot d’accueil de Christiane Féral-Schuhl, le président du Tribunal s’est exprimé sur le rôle de l’avocat dans les procédures devant le Tribunal de l’Union européenne en insistant sur l’importance de la formation des avocats.

La formation des avocats est au cœur des préoccupations de la CJUE.

Pour lui, l’avocat est un pilier de l’efficacité de la procédure et un acteur essentiel de la diffusion du droit de l’Union européenne. Il a également rappelé qu’il n’y avait pas de revirement de jurisprudence sans qu’un argument pertinent n’ait été soulevé par l’avocat : l’avocat est un contributeur essentiel de la décision de justice.

Présentation de l’affaire C-327/18 PPU R.O et audience de plaidoiries à la Cour de justice de l’Union Européenne

La journée à la Cour de justice de l’Union européenne a débuté par une présentation de l’affaire C-327 PPU R.O par Françoise Blum, référendaire, concernant un mandat d’arrêt européen.

La délégation a pu assister à l’audience de plaidoiries.

Saisie dans le cadre d’une procédure préjudicielle d’urgence, la Cour doit se prononcer sur les effets du Brexit dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen émis par le Royaume-Uni et sur les droits fondamentaux de la personne remises aux autorités britanniques.

En effet, dans la mesure où le Brexit pourrait avoir comme conséquence pour le citoyen européen remis aux autorités britanniques de ne plus jouir des droits qui lui sont conférés en vertu du droit de l’Union européenne et notamment de la Charte européenne des droits fondamentaux, l’Irlande est-elle tenue de remettre au Royaume-Uni un citoyen européen ?

La confiance mutuelle sur laquelle repose le mandat d’arrêt européen a-t-elle été définitivement mise à mal par la décision du Royaume-Uni de se retirer de l’Union européenne ?

Ces questions ont été débattues par les représentants du Royaume-Uni, de l’Irlande, de la Roumanie, de la Commission européenne et de la personne faisant l’objet du mandat d’arrêt européen contesté.

De gauche à droite : Christophe Clerc, membre de la commission des Affaires européennes et internationales, Florent Méreau, président de la commission Admission, Etienne Lesage et Philippe Klein, membres de la commission des Affaires européennes et internationales, Christiane Féral-Schuhl, présidente et Anne-Laure-Hélène des Ylouses, membre de la commission des Affaires européennes et internationales.

Entretien avec Koen Lenaerts , président de la Cour de Justice de l’Union européenne

A l’issue de l’audience, la délégation a eu l’opportunité de s’entretenir avec Koen Lenaerts, président de la CJUE. Ce dernier a présenté le rôle et le fonctionnement de la Cour en insistant sur le rôle des avocats.

Présentation de la CJUE par son président Koen Lenaerts

Il a notamment rappelé que tous les avocats sont les bienvenus à la Cour.

A l’origine des grands arrêts de principe, nous retrouvons souvent une question posée par une juridiction de première instance et soulevée par un avocat qui n’est pas habitué des procédures européennes : un renforcement de la formation est dès lors primordial, le développement du droit de l’Union européenne dépendant de la mobilisation des avocats.

Par ailleurs, le droit de l’Union européenne n’est pas un droit autonome des droits nationaux, mais une source de droit dans chacun de ses États membres, qui irrigue de plus en plus de matières.

Interrogé sur un possible recul de l’usage du français à la Cour, Koen Lenaerts a rappelé que le français était la seule langue de délibéré à la Cour et qu’il s’agissait d’une coutume constitutionnelle acceptée par tous, depuis sa création.

Sur le Brexit, et ses conséquences sur le droit de représenter une partie devant la Cour, il a précisé qu’un avocat peut plaider devant la Cour s’il est inscrit dans un pays membre de l’Union européenne. Un avocat britannique inscrit en Irlande pourra donc continuer à plaider devant la Cour. La question de l’examen de l’effectivité de l’exercice dans un autre État membre n’appartient pas à la Cour mais aux autorités nationales.

Entretien avec Stéphane Gervasoni, président de chambre au Tribunal de l’Union européenne

La délégation s’est entretenue avec Stéphane Gervasoni, président de chambre au Tribunal de l’Union européenne.

Stéphane Gervasoni

Celui-ci a présenté le fonctionnement du Tribunal depuis l’augmentation du nombre de juge et la disparition du Tribunal de la fonction publique européenne.

Ainsi, la juridiction traite entre 900 et 1000 affaires par an avec un stock constant de 1500 affaires pendantes.

La situation s’est toutefois nettement améliorée, le délai moyen de traitement ayant sensiblement diminué.

Il a également tenu à rappeler la distinction entre la Cour et le Tribunal. Tandis que la Cour est chargée du contrôle de l’application du droit de l’Union européenne par les États membres, le Tribunal lui, contrôle l’application du droit de l’Union européenne par les institutions.

Stéphane Gervasoni a également évoqué la question d’un transfert de compétence au profit du Tribunal des recours en manquement et de la question de la mise en place d’un mécanisme de filtrage des pourvois devant la Cour.

Il a également insisté sur l’importance du multilinguisme à la Cour et au Tribunal et par conséquent, de la promotion de la langue française.

Entretien avec Emmanuel Coulon, greffier du tribunal

La délégation s’est ensuite entretenue avec Emmanuel Coulon, greffier du Tribunal.

Cette rencontre a permis de mieux comprendre le travail de ce service indispensable à la juridiction et l’intérêt de la numérisation des échanges internes et externes en termes de temps, de coûts et d’efficacité.

Elle a également été l’occasion de revenir sur les dernières réformes du règlement de procédure et notamment, la gestion des documents produits en application de l’article 105 du règlement de procédure.

Entretien avec Jean-Marie Gardette, chef de l’unité de traduction pour le français

Enfin, la délégation a pu rencontrer Jean-Marie Gardette, chef de l’unité de traduction pour le français à la Cour de Justice de l’Union Européenne.

Une occasion d’échanger sur l’usage du français et des autres langues dans les procédures devant la Cour.

Ainsi, 87% des affaires introduites devant la Cour de justice le sont dans 5 langues, dont 20% en français.

Au cours de cet entretien, Jean-Marie Gardette a déploré un multilinguisme de façade dans les institutions européennes. Ainsi, à l’exception de la CJUE et du Tribunal, les autres institutions ne travaillent désormais qu’en anglais. Il y a donc un réel travail à faire pour encourager l’utilisation de la langue française. La pratique d’une langue est la promotion d’une pensée a rappelé Jean-Marie Gardette. Dès lors, le recours aux logiciels de traduction ne saurait remplacer le travail des 1200 juristes-linguistes de l’institution.

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