07 février 2024

L'AG du CNB réaffirme son opposition à la reconnaissance du legal privilege

Droit et entreprise
Institution
Statut professionnel de l'avocat

L'assemblée générale du 2 février 2024 a été l'occasion pour les membres du CNB d'examiner la proposition de loi relative à la confidentialité des consultations des juristes d'entreprises déposée et enregistrée au Sénat le 17 novembre 2023. Elle a une nouvelle fois affirmé, dans sa résolution adoptée à une large majorité, sa ferme opposition à la reconnaissance d'un privilège de confidentialité (legal privilege) couvrant les avis, consultations et correspondances émis par les juristes d'entreprises au sein de celle-ci.

Contexte

La confidentialité des avis des juristes d'entreprises est discutée depuis de longues années.

Le 29 et 30 mai 2015 déjà, l'assemblée générale du CNB avait affirmé son opposition à la reconnaissance d'un privilège de confidentialité des avis, consultations et correspondances émis par les juristes d'entreprises au sein de celles-ci. Pour autant, la question n'a pas été abandonnée par les pouvoirs publics et plusieurs rapports ont été rédigés en 2019 et 2021, envisageant le legal privilege comme une réponse aux difficultés posées notamment par la pratique de l'extraterritorialité.

À l'occasion de l'examen par le Sénat du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice, présenté par le garde des Sceaux le 3 mai 2023, un amendement a été déposé par le sénateur Hervé Marseille. Cet amendement du 7 juin 2023 conditionnait à la formation déontologique des juristes d'entreprises la reconnaissance de la confidentialité de leurs avis en matière de conformité.

L'assemblée générale du Conseil national des barreaux, convoquée en urgence le 3 juillet de la même année, a de nouveau affirmé son opposition à « la reconnaissance d'un privilège de confidentialité (legal privilege) couvrant les avis, consultations et correspondances émis par les juristes d'entreprises au sein de celle-ci, qui aboutirait à la création d'une nouvelle profession réglementée et à l'affaiblissement du secret professionnel de l'avocat au préjudice des entreprises et des particuliers. »

Opposition ferme au legal privilege

Finalement, une proposition de loi visant à garantir la confidentialité des consultations juridiques des juristes d'entreprises a été déposée et enregistrée au Sénat le 17 novembre 2023. Présentée par le sénateur et ancien avocat Louis Vogel, elle reprend avec quelques ajouts, les dispositions prévues par le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice 2023-2027. Le texte a été inscrit à l'agenda de la commission des lois du Sénat le 7 février 2024, et a une nouvelle fois été soumis pour consultation au Conseil national des barreaux.

La proposition de loi précitée encadre le régime de la confidentialité des avis des juristes d'entreprises en se fondant sur le texte adopté en commission mixte paritaire le 5 octobre 2023. Les dispositions de la proposition de loi prévoient notamment :

  • Une définition de la consultation juridique : « une prestation intellectuelle personnalisée tendant, sur une question posée, à la fourniture d'un avis ou d'un conseil fondé sur l'application d'une règle de droit en vue, notamment, d'une éventuelle prise de décision »
  • Les conditions d'application de la confidentialité :
    1. Conditions liées à l'auteur : le juriste d'entreprise doit être titulaire d'un Master en droit ou d'un diplôme équivalent français ou étranger, il doit justifier du suivi de formation initiale ou continue en déontologie et doit faire l'objet d'un lien de subordination.
    2. Conditions liées au destinataire : l'employeur du juriste d'entreprise doit être le destinataire exclusif des consultations.
    3. Conditions liées à l'acte : l'acte couvert par le secret peut être un avis juridique ou tout document préparatoire ayant permis la rédaction de la consultation juridique.
  • Le régime de la confidentialité :
    1. Opposabilité : seules sont concernés les procédures ou litige en matière civile, commerciale ou administrative
    2. Levée de la confidentialité : pour les mesures d'instruction dans les litiges civils ou commerciaux et pour les visites administratives.

Finalement, l'assemblée générale du CNB, dans sa résolution, a une nouvelle fois affirmé sa ferme opposition à la reconnaissance d'un privilège de confidentialité (legal privilege) couvrant les avis, consultations et correspondances émis par les juristes d'entreprises au sein de celle-ci.

Haut de page